4 constats à retenir sur les caractéristiques des toitures végétalisées
Les caractéristiques de 36 toitures végétalisées ont été minutieusement analysées dans l'étude scientifique GROOVES.
Les toitures végétalisées apportent-elles une réelle contribution à la nature en ville ? Entre 2017 et 2019, l'étude scientifique GROOVES (Green ROOfs Verified Ecosystem Services) a été menée en Île-de-France pour le découvrir. Les caractéristiques de 36 toitures végétalisées extensives, intensives, wildroof et semi-intensives, situées sur des bâtiments hétérogènes et de hauteurs variées, ont été analysées. À la clé : des éléments de compréhension pour guider les collectivités et paysagistes qui se demandent comment végétaliser une toiture avec une performance optimale.
1. La biodiversité est au rendez-vous sur les toitures végétalisées
Faune et flore ont été minutieusement étudiées afin de déterminer la place des toitures végétalisées en tant que lieux de vie naturels. Il apparaît que ces toitures abritent, en moyenne, une diversité en plantes similaire à celle rencontrée dans les friches et parcs urbains.
Concernant la richesse des plantes spontanées, syrphes et abeilles sauvages, la hauteur du bâtiment aurait un impact positif jusqu'à environ 10 mètres (soit trois étages). Les plantes spontanées représentent à elles seules 70 % des plantes inventoriées parmi 400 espèces. L'étude recense en majorité :
- Sedum album
- Sedum hispanicum,
- Sedum kamtschaticum
- Vulpia myuros
Certaines espèces menacées ou rares ont également été observées (c'est le cas de Ornithopus compressus et Ornithopus pinnatus), validant ainsi le rôle de diversification de la biodiversité des toitures végétalisées.
L'étude met en lumière une diversité importante d'invertébrés composée de 611 espèces, dont certaines peuvent être considérées comme « toiturophiles » ou au contraire « toiturophobes », avec une présence particulièrement forte de :
- hémiptères (punaises)
- hyménoptères
- araignées
- coléoptères
L'étude observe cependant un écart significatif entre les toitures les plus peuplées (107 espèces) et les moins peuplées (20 espèces), avec un avantage pour les toitures végétalisées semi-intensives et intensives qui attirent également davantage d'insectes pollinisateurs.
Pourquoi protéger la biodiversité est si important ?
Petit lexique de la toiture végétalisée
Toiture végétalisée extensive : couche de substrat mince, moins de 10 cm, dont l'entretien est réduit au minimum et sans arrosage.
Toiture végétalisée semi-intensive : couche de substrat autour de 20 cm, dont l'entretien est modéré et requiert un arrosage.
Toiture végétalisée intensive : couche de substrat autour de 30 cm. C'est le « toit jardin » accessible aux usagers et qui peut être utilisé comme potager urbain.
Toiture végétalisée wildroof : substrat sans semis ni plantations qui favorisent l'apparition d'une biodiversité spontanée.
2. Des substrats aux caractéristiques remarquables
Pour déterminer la composition des sols des toitures végétalisées, l'étude a défini trois catégories de substrats couramment utilisés dans ces aménagements (terre agricole, substrat mixte, substrat minéral) et les a confrontés avec les sols du référentiel national du RMQS, pour des résultats étonnants :
- la teneur en carbone organique et le pH sont significativement plus élevés ;
- les caractéristiques physicochimiques des toitures végétalisées sont très particulières ;
- la biomasse microbienne est plus doublée par rapport aux sols de référence ;
- la décomposition de la matière organique est plutôt lente.
Ce dernier point impacte positivement la richesse floristique. Cependant, cette dernière n’augmente plus au-delà de 25 cm d'épaisseur de substrat alors que la diversité en pollinisateurs continue à augmenter. L'étude souligne que les substrats de 30 cm contenant au moins 10 % d'argile et 60 % de sable sont plus à même de permettre une implantation de flore variée.
3. Une capacité de rétention en eau très variable selon le substrat
En cas de fortes pluies, toutes les toitures végétalisées ne sont pas logées à la même enseigne. Ainsi, l'étude s'aperçoit que la toiture la moins absorbante (substrat minéral,
3,5 cm d’épaisseur) a une performance de 6 L/m² contre 532 L/m² pour la plus absorbante (substrat agricole, 100 cm d’épaisseur).
Pour maximiser la capacité de rétention en eau, l'étude confirme que les toitures composées de substrats agricoles et mixtes présentent un avantage. Plus précisément, la couche de substrat d'une toiture végétalisée doit être entre 10 et 30 cm d'épaisseur pour une meilleure performance, avec un seuil théorique de 25 cm au-delà duquel la capacité de rétention en eau augmente de façon très significative.
Les toitures végétalisées pourraient donc compléter la boîte à outils des collectivités pour gérer le ruissellement des eaux pluviales, à condition de bien choisir la nature du substrat et son épaisseur.
4. Un rafraîchissement subordonné à la disponibilité en eau
À l'aide d'une chambre à évapotranspiration, l'étude GROOVES a constaté que la performance d'une même toiture pour rafraîchir peut être six fois plus importante avec une végétation plus développée. L’évapotranspiration maximale journalière reste cependant très variable entre les différents types de toitures, la plus forte performance étant 28 fois plus élevée que la plus faible. Une nouvelle fois, l'épaisseur du substrat et le type de végétation impactent grandement la capacité d'une toiture végétalisée à rafraîchir localement.
Le manque de disponibilité en eau peut cependant saper les performances des toitures végétalisées, y compris des toitures intensives. Ainsi, la végétalisation des toitures n'offrirait qu'une efficacité limitée en période de canicule précédée d'une faible pluviométrie et doit être considérée comme une pratique complémentaire à une végétalisation plus globale.
Compte tenu de leurs caractéristiques, les toitures végétalisées ne sont pas comparables aux autres espaces verts en zone urbaine et ne peuvent répondre à elles seules aux enjeux environnementaux. Elles offrent cependant de réels atouts pour favoriser la biodiversité, capter les eaux pluviales et, dans une moindre mesure, lutter contre la chaleur en zone urbaine. Avant de se demander comment végétaliser une toiture, la définition de l'objectif à atteindre est primordiale pour guider la conception.
© Crédit photo : HBPhoto / Adobe Stock