Carré des Jardiniers 2023 : « 80 % de la ville de 2050 est déjà construite », par Vincent Grunewald
Avec son jardin « L'entre deux bruits », Vincent propose une vision alliant requalification des petits espaces, recyclage et pédagogie pour faire accepter le réensauvagement des espaces verts urbains.
Il n'est pas si simple de trouver un havre de paix sonore au cœur d'une ville en effervescence, et c'est précisément le challenge relevé par l'architecte-paysagiste Vincent GRUNEWALD. Avec son jardin « L'entre deux bruits », Vincent propose une vision alliant requalification des petits espaces, réemploi des végétaux et matériaux in situ, et pédagogie ludique pour faire accepter le réensauvagement d'un espace vert urbain. À quelques semaines du Carré des Jardiniers 2023, il nous confie aujourd'hui comment il compte répondre au thème imposé « Biodiver’Cité : Comment habiter la ville de demain ? ».
Quel est votre parcours de paysagiste, en quelques mots ?
Vincent Grunewald : Je suis tombé dedans quand j'étais petit, car j'allais au club nature avec des copains. On faisait de la restauration de mares, de la pose de crapauducs, des sorties week-end nature… Tout ça a développé cet intérêt pour le végétal et la conscience de la beauté des écosystèmes.
Entre mon BTS aménagements paysagers et l'école d’ingénieur ITIAPE, j'ai voyagé. J'ai découvert l'immensité — et l'hostilité — des paysages d'Australie. En Nouvelle-Zélande, j'ai pris conscience de la diversité et de la vulnérabilité des paysages. J'aime beaucoup la haute montagne où l'on inverse le rapport de force avec l'environnement. Ça se ressent dans mon approche : effacer les limites entre le jardin à aménager et le paysage environnant, et préserver au maximum le végétal déjà en place.
Le portrait chinois de Vincent GRUNEWALD
Dans chaque jardin, on retrouve une part de la personnalité du paysagiste qui l'a conçu.
- Si j'étais un mot, je serais… « positif »
- Si j'étais un son, je serais… « le silence »
- Si j'étais une émotion, je serais… « la surprise »
- Si j'étais un type de musique, je serais… « le rock'n'roll »
- Si j'étais un plat, je serais… « la carbonade flamande »
- Si j'étais une heure de la journée, je serais… « 9h du matin »
- Si j'étais un superpouvoir, je serais… « rendre les gens conscients »
Comment vous est venu le concept de votre jardin « L'entre deux bruits » ?
Vincent Grunewald : Je suis assez sensible au bruit et en décembre dernier, j'ai visité le parc de la Tête d'Or (Lyon). Dedans, tous les bruits de la ville sont devenus secondaires. Et en ressortant, on est vite rappelé à la réalité ! Cependant, les bruits de la ville ne sont pas toujours perçus négativement. Je préfère les atténuer que les supprimer, en proposant une bulle acoustique au cœur du tumulte. Sur le salon Paysalia, les bruits de la ville seront remplacés par le brouhaha du hall d'exposition. Les habitués savent ce que ça représente..!
Comment abordez-vous le thème de la biodiversité ?
Vincent Grunewald : Je ne suis pas un urbain dans l'âme, mais je trouve la dynamique de la ville très intéressante, avec cette résilience du végétal qui pousse là où on ne l'attend pas. Je ne cherche pas à mettre en opposition ville et végétal, mais à les associer, en partant de la statistique suivante : 80 % de la ville de 2050 est déjà construite (Christine LECONTE et Sylvain Grisot – Réparons la ville). Comment apporter du végétal dans une ville qui est déjà là ? Comment offrir une solution locale de végétalisation dans des petits espaces qui peuvent s'insérer ici et là, et permettre de faire une coupure momentanément ? C'est le point de départ de ma réflexion.
Mes clients — qu'ils soient privés ou publics — ne prennent souvent pas en compte l'usage, la fréquence d'utilisation des espaces, l'entretien post-travaux. Je leur propose une gestion différenciée pour favoriser la biodiversité, même si c'est plus difficile à mettre en pratique dans des petits espaces : la ronce devient vite envahissante, les herbes hautes peuvent être contradictoires avec certains usages comme les jeux de ballon… Dans notre jardin urbain « L'entre deux bruits », on a voulu faire de la pédagogie pour aider les non-initiés à reconnaitre la beauté dans ces espaces verts urbains en autogestion. C’est un enjeu important pour la transition du modèle paysager urbain.
Vous rencontrez des difficultés pour convaincre vos clients de favoriser la biodiversité dans leur jardin ?
Comment intégrez-vous les tendances actuelles du jardin dans votre création ?
Vincent Grunewald : On a identifié deux sujets majeurs : le réemploi et le tiers paysage. Concernant la réutilisation des végétaux, c'est difficile, car la filière du réemploi de plantes est peu développée actuellement. Le végétal reste encore, malheureusement, la variable d'ajustement dans les projets urbains comme paysagers. On arrache, brûle, broie les végétaux qui gênent, mais on les remet rarement en pépinière. Vu les contraintes d'organisation liées au concours, nous avons donc privilégié le réemploi de matériaux.
Quelles émotions souhaitez-vous susciter auprès des professionnels qui visiteront votre jardin urbain ?
Vincent Grunewald : J'aimerais voir les gens s'asseoir, prendre le temps d'observer, découvrir les petits détails avec curiosité, comme quand on est enfant. Nous allons jouer sur les cinq sens en essayant de minimiser la vision et stimuler davantage les autres sens.
Pouvez-vous nous présenter l'équipe qui vous épaule pour ce concours Carré des Jardiniers ?
Vincent Grunewald : Nous sommes cinq sur ce projet et toute l'équipe de CHEVAL Paysages nous soutient. Je travaille en indépendant et j'ai contacté Kévin TERPANT (chargé d'affaires de Cheval Paysage), un copain de formation, pour faire ce projet ensemble. Il en parlé à sa direction et ça a matché. C'est une vraie chance de l'avoir à mes côtés, il me seconde énormément ! Il y Marc BELLATON, qui apporte toute sa connaissance du concours pour y avoir déjà participé, dans une autre équipe, en 2019. Alexy NOIRY, apprenant de BTS, renforce l’équipe par son énergie et sa soif d’apprendre.
Nous avons aussi intégré Nina BERGER et en sommes très heureux, car on veut aussi montrer que la profession se féminise, avec des profils souvent issus de reconversion.
Envie de déambuler dans le jardin urbain de Vincent GRUNEWALD, et de découvrir toutes ses techniques pour amener plus de biodiversité en ville ? Rendez-vous sur le salon Paysalia, du 5 au 7 décembre 2023.
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